À l’échéance 2060-2100, le Groupe intergouvernemental d’Experts sur le Climat (GIEC) prévoit une augmentation globale moyenne de 4°C. Ce sujet plus que d’actualité avec l’ouverture de la COP22 doit mobiliser les français. Et si nos jardins pouvaient contribuer à faire baisser la température ? C’est en tout cas la conviction de l’architecte paysagiste Eric Lequertier, double lauréat des Victoires du Paysage, qui nous livre son mode d’emploi du jardin bioclimatique au secours de la planète.
J’opte pour un jardin bioclimatique
9 Français sur 10 restent optimistes face au réchauffement climatique, estimant qu’il existe des « solutions novatrices » susceptibles d’en limiter l’impact. Coïncidence : dans une précédente étude ils déclaraient, dans la même proportion, « ne pas pouvoir se passer du contact quotidien avec le végétal »* ! Le lien est évident. Favoriser la biodiversité est à la portée de chacun d’entre nous. Jardins privés, balcons fleuris, terrasses et toitures végétalisées, contribuent tout autant que les promenades plantées et les jardins publics, à la création de « trames vertes ».Les Français sont donc en première ligne pour adopter les « réflexes jardin » qui font du bien à la planète… et au climat.
*source UNEP : Union Nationale des Entreprises du Paysage
Le jardin, un lieu d’harmonie et de synergies
Dans un jardin, les différentes espèces vivantes interagissent en permanence : bactéries, champignons, insectes, plantes, oiseaux… C’est un équilibre fragile, qu’il faut préserver. Un jardin foisonnant est signe de vitalité. Pour penser son jardin comme un véritable allié du climat, il faut changer notre regard, ne pas chercher la perfection au brin d’herbe près…et préférer ce que l’on appelle une gestion « différenciée » – c’est-à-dire doser les traitements et adapter les soins prodigués selon les zones du jardin.
L’évolution a permis l’émergence de symbioses entre différentes espèces au sein d’écosystèmes naturels. Il est possible de s’inspirer de ces complémentarités pour créer un jardin fonctionnel qui ne nécessite pas d’apport de produits de synthèse ! Par exemple, les lavandes sont efficaces contre les pucerons, il faut donc les placer à proximité des rosiers, en outre cela attirera les abeilles. Il est également plus que conseillé d’acheter des végétaux issus d’essences locales
Je prends soin de la biodiversité
Protéger la diversité biologique en ville : chaque jardin compte !
Lorsqu’ils sont entretenus par des méthodes respectueuses de l’environnement, les jardins, terrasses et balcons sont des refuges pour la biodiversité en ville. Ils représentent des maillons essentiels de la « trame verte et bleue » que les collectivités mettent en place : il s’agit de recréer des couloirs de nature, qui favorisent la mobilité et la vitalité des espèces animales et végétales en ville. Cette problématique est d’autant plus importante qu’avec le réchauffement climatique, les espèces vont migrer et risquent de disparaître si les villes restent infranchissables. Accueillir la faune urbaine peut aussi faciliter l’entretien « naturel » du jardin : les oiseaux (mésanges, moineaux…) et coccinelles sont de grands consommateurs d’insectes et contribueront à entretenir le jardin sans pesticides.
Maison, boulot, balcon : je passe au « tout végétal »
Végétaliser chaque espace de vie. Aujourd’hui, le jardin est devenu multiforme et se végétalise sur plusieurs strates, bien au-delà de la simple pelouse. Mais en plus, il s’invite dans chaque recoin des bâtiments, à l’extérieur comme à l’intérieur. En l’absence de jardin, il existe de nombreuses astuces pour apporter de la verdure dans son logement : potagers verticaux, mini serres d’intérieur, toitures végétalisées, jardins « sous cloche »… l’installation de végétaux sur les toits, les terrasses et au bureau, contribue au verdissement de l’espace urbain.
Les toitures végétalisées, par exemple, sont bénéfiques à la fois pour l’environnement et les occupants. Elles permettent d’améliorer l’étanchéité du bâtiment (pérennité améliorée de 10 ans), absorbent les gaz à effet de serre, améliorent la gestion des eaux pluviales et renforcent l’isolation thermique, diminuant les besoins en chauffage.
Pensez aussi au rôle des plantes pour assainir l’air intérieur, par exemple au bureau : outre leur attrait esthétique, les végétaux n’ont pas leur pareil pour épurer l’air ! Les experts préconisent une plante pour 10 m² d’espace clos.
Arrosage et déchets verts : STOP au gaspillage !
Arrosage : mieux gérer l’or bleu. Du dispositif d’arrosage « maison » permettant d’alimenter en eau sa jardinière, aux systèmes de goutte à goutte contrôlés depuis son smartphone, à chaque jardin correspond une solution d’apport d’eau appropriée. Ces techniques permettent :
- de préserver les réserves d’eau affectées à l’utilisation urbaine, un enjeu crucial face aux dérèglements climatiques qui perturbent le cycle de renouvellement des nappes phréatiques.
- une meilleure croissance des plantes, arrosées au bon moment et à la dose juste.
Déchets verts, des ressources insoupçonnées : les déchets organiques pourront devenir une source d’énergie verte (méthanisation, bois-énergie) ou d’engrais naturel (compost, paillis / mulch) avec les branches, écorces et feuillages issus de l’entretien des plantes.
Exit les pesticides, place aux techniques alternatives
Les particuliers ont jusqu’à 2019 pour supprimer totalement l’utilisation de produits phytosanitaires au jardin. Il va falloir apprendre à se passer des pesticides, insecticides et autres herbicides. Ces substances nocives pour les êtres vivants impactent la qualité de l’eau, de l’air et des sols. Diminuer progressivement l’utilisation des pesticides pour n’utiliser que le strict nécessaire. Beaucoup de techniques permettent de préserver la biodiversité mais elles sont encore trop méconnues :
- pour remplacer les engrais de synthèse, on peut opter pour un lombricompost ;
- pour supprimer les insecticides, un « insectifuge » naturel à base d’infusion de plantes (de rhubarbe contre le ver du poireau, de lavande contre les fourmis et pucerons…) remplacera les produits nocifs.